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1/7 Mon œuvre est-elle protégée par la législation sur le droit d’auteur ?

Sept grandes questions (et de nombreuses sous-questions) pour tout savoir et tout comprendre au droit d'auteur ! Pour commencer, votre œuvre est-elle protégée par la législation sur le droit d'auteur ?


1 Mon œuvre est-elle protégée par la législation sur le droit d’auteur ?

1.1. Quelles sont les conditions de protection d’une œuvre ?
1.2. Quand peut-on considérer qu'il s'agit d'une création littéraire et artistique ?
1.3. Quand une œuvre est-elle mise en forme ?
1.4. Quand une œuvre est-elle originale ?
1.5. Quelles sont les créations susceptibles d’être protégées par le droit d’auteur ?
1.5.1. Adaptations
1.5.2. Chorégraphies
1.5.3. Créations publicitaires
1.5.4. Jeux télévisés et concepts d’émissions
1.5.5. Œuvres architecturales
1.5.6. Œuvres audiovisuelles
1.5.7. Œuvres littéraires
1.5.8. Œuvres musicales
1.5.9. Œuvres plastiques
1.5.10. Œuvres scientifiques et œuvres historiques
1.5.11. Œuvres utilitaires / Dessins et modèles
1.5.12. Personnages
1.5.13. Photographies
1.5.14. Programmes d’ordinateur
1.5.15. Recueils d’œuvres, anthologies, encyclopédies
1.5.16. Sites web
1.5.17. Slogans
1.5.18. Titres
1.5.19. Traductions
1.5.20. Bases de données
1.6. Quelles sont les créations exclues de la protection par le droit d’auteur ?
1.7. Œuvres explicitement exclues par la législation belge sur le droit d’auteur
1.8. Œuvres dans le domaine public
1.9. Le dépôt des œuvres est-il une condition de protection ?

 

NB : retrouvez ici les 6 autres grandes questions du FAQ juridique.


1 Mon œuvre est-elle protégée par la législation sur le droit d’auteur ?


1.1. Quelles sont les conditions de protection d’une œuvre ?

Une œuvre est protégée par la législation belge sur le droit d’auteur (intégrée dans le Code de droit économique) s’il s’agit d’une création littéraire ou artistique originale et qu'elle a été mise en forme.

La protection du droit d’auteur existe sans qu’aucune formalité ne doive être remplie. Dès sa création, une œuvre qui répond aux conditions d’originalité et de mise en forme est protégée par le droit d’auteur.

Il est cependant conseillé d’effectuer un dépôt (lien : comment protéger mon œuvre avant diffusion publique ?)de son œuvre avant toute divulgation auprès d’un tiers de confiance (sociétés de gestion collective, par exemple) (voir question 7.1 : « Quelles sont les missions d’une société de gestion collective de droits d’auteur ? »).

Le dépôt, (lien : le dépôt est-il une condition de protection ?) qui est donc facultatif, constitue uniquement un moyen de preuve quant à la date de création et à l’identité de l’auteur de la création.


1.2. Quand peut-on considérer qu’une œuvre est une création littéraire et artistique ?


Les dispositions belges en matière de droit d’auteur ne définissent pas la notion de « création littéraire et artistique ».

La Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886, a énuméré de manière non-limitative, dans son article 2, ce qu’on pouvait considérer comme étant des œuvres littéraires et artistiques : « Les termes « œuvres littéraires et artistiques » comprennent toutes les productions du domaine littéraire, scientifique et artistique, quel qu’en soit le mode ou la forme d’expression, telles que :
- les livres, brochures et autres écrits ;
- les conférences, allocutions, sermons et autres œuvres de même nature ;
- les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales ;
- les œuvres chorégraphiques et les pantomimes ;
- les compositions musicales avec ou sans paroles ;
- les œuvres cinématographiques, auxquelles sont assimilées les œuvres exprimées par un procédé analogue à la cinématographie ;
- les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;
- les œuvres photographiques, auxquelles sont assimilées les œuvres exprimées par un procédé analogue à la photographie ;
- les œuvres des arts appliqués ;
- les illustrations ;
- les cartes géographiques, les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture ou aux sciences… »

L’avantage de ne pas avoir de définition précise de la notion d’« œuvre littéraire et artistique » permet de lui donner une interprétation souple et évolutive.

Ainsi, peuvent également être considérées comme des créations littéraires ou artistiques : les jouets, les jeux, les lettres, les manuels génétiques, les sites web, etc.

Toute création n’est pas protégeable : elle doit revêtir une certaine forme et être originale.

(Voir la question 1.5 : « Créations susceptibles d’être protégées par le droit d’auteur »)


1.3. Quand une œuvre est-elle mise en forme ?


Une œuvre est mise en forme lorsqu’elle est coulée dans une forme particulière qui la destine à être communiquée.

Un simple développement suffit (à l’état d’ébauche ou de brouillon). N’importe quelle mise en forme est suffisante (système d’écriture braille, utilisation d’un code lisible par une machine, etc.).

C’est aussi par la mise en forme de son idée, par les choix que cela implique, que l’auteur donne son style personnel et donc l’originalité à son œuvre.

Une personne bénéficiera de droits d'auteur sur une mélodie à partir du moment où elle a été écrite sous forme de partition, enregistrée par un quelconque moyen ou simplement chantée. Il n'est donc pas indispensable de fixer sa création sur un support matériel pour bénéficier de la protection par le droit d'auteur. La prononciation d’un discours ou d’une interview vaut également mise en forme car l’idée a été concrétisée en forme orale destinée à être communiquée au public.

C’est donc la mise en forme d’une idée qui est protégée par le droit d’auteur, et non l’idée en tant que telle.

Une idée, un style ou un thème ne sera pas protégé par le droit d’auteur. (Voir la question 1.6 : « Quelles sont les créations exclues de la protection par le droit d’auteur ? »).


1.4. Quand une œuvre est-elle originale ?

Ce critère n’est pas défini dans notre législation, sauf pour ce qui concerne les photographies, les bases de données et les programmes d’ordinateur.

Selon la doctrine et la jurisprudence, il doit s’agir d’une création marquée par la personnalité de son auteur, portant son empreinte personnelle.

La création doit donc dépasser ce qui est purement banal.

L’auteur doit être en mesure de démontrer qu’il a effectué des choix personnels, qui témoignent d’un point de vue personnel de l’auteur. En matière de photographie par exemple, le photographe doit être capable de justifier le choix de l’angle de vue, de l’objectif, de la lumière, etc.
A contrario, une œuvre dont la forme est purement déterminée par des exigences techniques ou fonctionnelles ne pourra pas être protégée par le droit d’auteur. Ainsi, l’assistant réalisateur adjoint qui effectue une prestation technique et respecte les directives figurant dans le scénario ne peut revendiquer la qualité d’auteur (Cour d’appel de Paris, 4 juillet 2012).

Dans l’appréciation de l’originalité, il n’est pas tenu compte de la valeur artistique ou esthétique de la création.

Il n’est pas plus tenu compte de l’importance de l’effort : une création peut être le résultat d’années de travail ou de quelques minutes de travail.

En outre, une création ne doit pas être nouvelle. Sur base d’une idée existante, on peut réaliser une création originale. Il n’y a donc pas de condition de nouveauté.
Ainsi, une anthologie peut être originale alors qu’elle ne fait que compiler des textes anciens, puisque la compilation elle-même peut avoir été réalisée sous un prisme original. En matière de photographies, des objets qui ont déjà été souvent pris en photos peuvent également constituer des œuvres originales du fait, par exemple, de l’originalité de l’éclairage. On peut aussi citer l’exemple des chansons populaires qui consistent en l’assemblage d’airs préexistants.

Enfin, notons que les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain dans l’appréciation de l’originalité des œuvres de l’esprit :

→ (Cour de cassation française, 13 novembre 2008, « Être et avoir ») Dans cette affaire, un instituteur filmé dans un documentaire (« Être et avoir ») revendiquait un droit d’auteur sur son cours et sur le film. Le juge exerça son pouvoir souverain d’appréciation de l’originalité des œuvres de l’esprit en considérant que « ni la composition ni l’enchaînement des cours de l’instituteur reproduits dans le documentaire ne présentaient de caractère original » et que « les leçons, qui ne révélaient aucun choix inédit d’exercices ou de textes susceptible de donner prise au droit d’auteur, étaient également dépourvues d’originalité ».

À titre d’exemples d’œuvres ayant été considérées comme originales, voir la question 1.5 : « Créations susceptibles d’être protégées par le droit d’auteur ».

 

1.5. Quelles sont les créations susceptibles d’être protégées par le droit d’auteur ?

Les catégories d’œuvres sont illimitées si les conditions de protection sont remplies.


1.5.1. Adaptations

Une œuvre adaptée sera considérée comme protégeable si elle est suffisamment originale (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »)

L’œuvre dérivée ne pourra être exploitée qu’avec le consentement du titulaire du droit d’auteur de la première œuvre.

Le droit d’auteur sur l’œuvre dérivée sera exercé par l’auteur de l’œuvre première et l’auteur de l’œuvre dérivée.

Il est conseillé à l’auteur de l’œuvre dérivée de toujours prévoir un contrat entre lui-même et l’auteur de l’œuvre première.

(voir question 2.4 : « Qui détient les droits d’auteur sur une œuvre créée par plusieurs auteurs ? »)

Voici un exemple illustrant la nécessite d’un consentement pour créer une œuvre dérivée d’une œuvre préexistante :

→ (Civ. Bruxelles (14ième ch.), 2 mars 1999) Cette affaire porte sur l’adaptation de l’œuvre d’Ensor, le tableau « Les masques », par A. Stas à travers un procédé de collage, pour la réalisation de la couverture d’un catalogue. Les droits de l’artiste Ensor sont détenus par la Sabam. Ainsi, Stas aurait dû, au préalable, obtenir le consentement de la Sabam pour adapter l’œuvre d’Ensor, ce qui n’a pas été fait.


1.5.2. Chorégraphies

Une scène d’une chorégraphie peut être originale et donc faire l’objet d’une protection par droit d’auteur (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») ?

→ (Cour d’appel de Bruxelles, 18 septembre 1998) Une scène d’une chorégraphie présentant un Icare, presque nu, avec des ailes sur le dos et des téléviseurs accrochés aux pieds, a été considérée comme protégeable, malgré le fait que les éléments pris individuellement sont des éléments connus (leur combinaison formant un tout original).


1.5.3. Créations publicitaires

Le matériel publicitaire peut être protégé s’il est original (ex. affiches, logo etc.…) (voir question 1.4: « Quand une œuvre est-elle originale ? »).

L’idée ou le thème sous-jacent à la création publicitaire ou à une campagne publicitaire est par contre exclu de la protection (voir question 1.6 « Quelles sont les créations exclues de la protection par le droit d'auteur ? »).

→ (Cour de Cassation, 19 mars 1998) Le concept publicitaire d’une grande chaussure dominant entièrement le plan, placée sur un fond de couleur uni et clair et accompagnée d’un texte, qui se réfère à des textes ludiques, n’est pas protégeable par le droit d’auteur.

→ (Cour d’appel Bruxelles, 3 mars 2010) Un dessin publicitaire sur des emballages de préservatifs va être modifié sans le consentement de son auteur. Or, selon le juge, le dessin est une œuvre originale protégée par le droit d’auteur. L’originalité résulte de l’association d’un préservatif avec un cœur, et du message sous-jacent qui en découle, c’est-à-dire la nécessité de se protéger lors d’une relation sexuelle.


1.5.4. Jeux télévisés et concepts d’émissions

Les jeux télévisés et les concepts d’émissions se trouvent souvent dans une zone grise du droit d’auteur où il n’est pas toujours évident de faire une distinction entre l’idée et la mise en forme de l’œuvre.

À titre d’exemple, le projet d’un jeu télévisé où le joueur doit répondre à des questions sur des sujets culturels et sportifs divers, dans une compétition de rapidité avec d’autres joueurs ne sera pas protégé. D’autre part, de nombreux jeux sont des adaptations de jeux appartenant au fond commun. Par contre, l’élaboration concrète du jeu, composée de graphismes, d’animations, et d’autres éléments qui lui donnent un caractère original, pourrait être protégée par le droit d’auteur (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »).

→ (Cour d’appel de Bruxelles, 15 octobre 2002) Selon la Cour, la composition du programme radio « Golfbreker » est protégeable par le droit d’auteur. Si les interviews, les jeux, l’agenda des évènements, etc. sont des éléments banals, la manière dont chacun de ces éléments s’imbrique et la forme finale obtenue confèrent à l’ensemble un caractère original et donc protégeable. D’un autre côté, un élément original protégé par le droit d’auteur ne confère pas au jeu une protection au titre du droit d’auteur.

→ (Prés. Trib. Bruxelles (cess.), 18 décembre 2012) Dans ce litige opposant un auteur à RTL, le juge reconnaitra une protection par le droit d’auteur à un format de programme télévisé relatif à la prévention routière (« Permisd’rire »), car le considérera comme original et empreint de la personnalité de son créateur. L’ensemble des composants des émissions, tels que l’objet, les thèmes, l’intervention de personnalités, et les titres, sont originaux.

→ (Bruxelles, 28 février 2008) Un format télévisé sera protégé par le droit d’auteur lorsqu’il sera exprimé dans une forme développée, structurée et exprimant la personnalité de son auteur. Bien que la Cour considère le format de programme de télévision appelé « Super Champs », sorti en 2002, créé par Mr. V comme original, il ne contient pourtant que trop peu d’éléments concrets pour le considérer comme étant mis en forme. Par conséquent, ce format ne sera pas protégé par le droit d’auteur. La VRT n’a donc commis aucune contrefaçon lorsqu’elle produit une série « Eeuwige Roem », qui contient des éléments similaires à l’émission de Mr. V.
Il est donc plus que conseillé que le projet d’une émission télévisuelle soit suffisamment élaboré et que le plus d’éléments possibles soient décrits.
En ce qui concerne les jeux télévisés : les règles du jeu, le développement du jeu, le décor, les tunes, les syntaxes de phrases, les candidats, membres du jury, présentateurs, etc., doivent être décrits de manière très claire de façon à ce qu’ils soient susceptibles de répétition et qu’ils soient considérés comme déterminants par le spectateur pour ce jeu télévisé.


1.5.5. Œuvres architecturales

Tant l’édifice que les plans, les dessins et les maquettes peuvent être protégés par le droit d’auteur. L’appréciation de l’originalité (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») est rendue difficile par le fait que l’on se situe à la frontière de l’art et de la technique. Les juges examinent généralement cette condition en vérifiant l’empreinte de la personnalité de l’auteur dans les choix opérés dans les plans, qui ne peuvent pas avoir uniquement été dictés par des contraintes techniques.

À titre d’exemple, voici deux arrêts à l’issue desquels les juges ont estimé que l’œuvre architecturale était originale :

→ (Civ. Bruxelles, Ordonnance du 25 octobre 2002) En 2002, une maison construite par Kroll et Vandenhove va être considérée comme originale, en ce sens que « le caractère original de l'œuvre résulte, en l'espèce, de la combinaison des lignes particulières de la maison (celle-ci ressemblant à un cube dont toutes les faces sont presque totalement fermées à l'exception d'une qui est presque totalement vitrée), des matériaux choisis, des effets techniques obtenus et de la polychromie discrète réalisée ». L’œuvre architecturale, originale, est alors protégée par le droit d’auteur.

→ (Tribunal civil de Liège (président) 25 avril 2005) Sera considérée comme originale une œuvre architecturale présentant les caractéristiques suivantes : « outre l'impression d'ensemble qui se dégage de l'édifice, la toiture est un des éléments marquants : pyramidale, munie d'un éclairage zénithal auquel répond une échancrure à l'angle opposé, elle donne l'impression d'une toiture flottante accrochée au sol ». Le choix des matériaux contribuera à renforcer l’originalité de l’œuvre architecturale.


1.5.6. Œuvres audiovisuelles

Une œuvre audiovisuelle se caractérise par une succession d’images. Elle englobe les œuvres cinématographiques, les téléfilms, les jeux vidéos, les œuvres d’animation, les documentaires, les séries, les court-métrages, etc.

L’œuvre audiovisuelle répond généralement au critère d’originalité (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») lorsque l’auteur traite du sujet d’une manière personnelle. Elle est donc protégée par le droit d’auteur vu les choix personnels effectués par ses auteurs : l’angle de prise de vue, le choix du cadrage, la lumière, la mise en scène, etc.

→ (Cour d’appel de Paris, 6 juin 2012) Un photographe-reporter avait filmé « un cheval scellé sans cavalier galopant dans les rues de Paris ». Il avait vendu la vidéo au quotidien Le Parisien, lequel l’avait diffusée sur son site web. Constatant que la vidéo avait été diffusée sur un autre site sans son autorisation, le reporter décida d’engager une action en contrefaçon. Selon lui, le caractère original de son œuvre se manifestait dans le choix du cadrage, des plans et dans le « rythme constant » de la vidéo. Si de tels éléments peuvent suffire à caractériser une œuvre d’originale, la Cour constata qu’en l’espèce l’originalité faisait défaut. Selon la Cour, si le photographe « [avait] pu exploiter financièrement les images ainsi saisies relatant un sujet extraordinaire qui [s’était] imposé à lui, il ne [l’avait] manifestement pas réellement mis en scène » ; il s’était au contraire « contenté de se mettre dans le sillage d’un véhicule d’intervention (…), en filmant le cheval en cavale, puis de filmer celui-ci une fois qu’il [avait] été rattrapé ». Ceci pour dire que le fait de filmer un événement en cherchant simplement à en montrer les protagonistes n’implique aucun « parti pris esthétique » et ne peut donner naissance à une œuvre originale.

→ (Cour d’appel Douai, 20 mai 1996) Dans cette affaire, le juge a été amené à se prononcer sur l’originalité d’une œuvre cinématographique et, le cas échéant, décider si un film sorti ultérieurement, similaire en beaucoup de points au premier, plagie cette première œuvre. Le film, « Le prix du danger », a comme sujet un jeu télévisé meurtrier. Il affirmera que, malgré le thème du film relativement « banal », l’empreinte personnelle de l’auteur du premier film s’exprime à travers le choix de l’enjeu, la construction du scénario et la sélection des personnages et objets. Parce que le film est original, il sera protégé par le droit d’auteur. Le film ultérieur empruntant des éléments protégés par le droit d’auteur au film « Le prix du danger » constitue une contrefaçon de ce dernier.

→ (Tribunal de Grande Instance de Paris, 3ième chambre, 20 décembre 2013) Pour établir la contrefaçon, une œuvre doit emprunter un ou des éléments d’une œuvre préexistante protégé(s) par le droit d’auteur. Dans cette affaire, les auteurs d’un court métrage estiment que le scénario du film « Colombiana » plagie leur œuvre. Ce ne sera toutefois pas l’avis du juge, qui considère que les vagues similitudes entre l’œuvre audiovisuelle et le scénario (à savoir « le thème en cause, la vengeance d’une petite fille qui voit ses parents assassinés sous ses yeux ») ne concernent pas des éléments originaux. Il n’y a alors pas contrefaçon.

→ (Tribunal de première instance de Bruxelles) Monsieur X. est chargé d’écrire un scénario pour Madame Y, qui n’aboutira toutefois à aucun résultat. Quelque temps plus tard, X s’aperçoit que Y se prévaut d’un scénario, et remarque qu’il s’agit du sien, retravaillé par Y (mais conserve certain élément originaux du premier scénario) et estime donc en être le coauteur. Les deux scénarii comportent effectivement des éléments similaires : ils ont comme objet l’anorexie, l’histoire se déroule dans une famille bourgeoise, le personnage principal est une jeune fille appelée Alice, mal dans sa peau, qui refuse sa féminité, etc. L’auteur du premier scénario introduit une action contre Y. Après une analyse comparative entre les deux scénarii, le Tribunal ne va pourtant pas retenir qu’il y a, en l’espèce, de contrefaçon car les griefs du premier n’entrent pas dans le champ d’application de la loi sur le droit d’auteur, ce ne sont pas des éléments protégés. Le juge estime donc que le deuxième scénario ne conserve aucun élément original du premier.


1.5.7. Œuvres littéraires

Les œuvres littéraires, tels que les romans, les bandes dessinées, les essais, les nouvelles ou poèmes sont dans la plupart des cas considérées comme suffisamment originales et donc protégeables (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »).

Par exemple :

→ (Civ. Charleroi (3e ch.), 19 décembre 2014) Dans cette affaire, le juge a décidé qu’un ouvrage relatif à la vie de René Magritte plagie un ouvrage préexistant, sur le même sujet. Le juge affirme que l’œuvre plagiée revêt un caractère original « en ce qu’elle appréhende la jeunesse du peintre René Magritte sur le ton d’une enquête policière, ponctuée de témoignages recueillis au cours de longues investigations par l’auteur lui-même auprès de contemporains de l’artiste, et enrichie de documents iconographiques inédits ». La manière dont l’ouvrage prend vie reflète la personnalité de son auteur.

Nous voyons ici que la question ne porte pas sur les faits historiques, qui ne sont pas protégeables au titre du droit d’auteur mais bien de leur mise en forme, en l’occurrence ici leur mise en forme dans le cadre d’une enquête policière.


1.5.8. Œuvres musicales

La protection qui peut être accordée à une œuvre musicale porte sur la mélodie (ou le thème). Selon la jurisprudence, l’harmonie et le rythme ne peuvent pas en eux-mêmes être protégés par le droit d’auteur. Ces deux éléments du langage musical doivent impérativement être couplés à une mélodie (même tombée dans le domaine public) pour former une œuvre sujette à protection par le droit d’auteur.

→ (Cour d'appel Mons, 3 février 2014) Un artiste, Salvatore Aquaviva, introduit une action à l’encontre de Madonna, considérant que les premières notes du tube « Frozen » de cette dernière plagie une de ses musiques. Toutefois, selon le juge, l’œuvre du plaignant n’est pas originale : les quelques notes de la chanson du plaignant ne portent pas suffisamment sa touche personnelle, dans leur combinaison et répétition. Elle ne sera donc pas protégée par le droit d’auteur, et, par conséquent, Madonna ne s’est pas rendue coupable de plagiat.


1.5.9. Œuvres plastiques

Les peintures, les lithographies, les sculptures, etc. peuvent faire l’objet d’une protection par droit d’auteur si elles sont originales (voir question 1.4: « Quand une œuvre est-elle originale ? »).

→ (Cour de Cassation, 13 novembre 2008) L’approche conceptuelle d’un artiste consistant à apposer un mot dans un lieu particulier en le détournant de son sens commun peut aboutir à une réalisation matérielle originale. En l’espèce, selon la Cour, « l’apposition du mot « Paradis » en lettres dorées avec effet de patine et dans un graphisme particulier, sur une porte vétuste, à la serrure en forme de croix, encastrée dans un mur décrépi dont la peinture s’écaille » forme une combinaison impliquant des choix esthétiques traduisant la personnalité de l’auteur.


1.5.10. Œuvres scientifiques et œuvres historiques

Les concepts scientifiques ne sont pas protégés par le droit d’auteur (voir question 1.6 : « Quelles sont les créations exclues du droit d’auteur ? »). Il en est de même pour les découvertes scientifiques. Seule la mise en forme du travail scientifique, des concepts scientifiques ou du fait historique est susceptible d’être protégée par le droit d’auteur. (voir question 1.3 : « Quand une œuvre est-elle mise en forme ? »).


1.5.11. Œuvres utilitaires / Dessins et modèles

Les dessins et modèles visent les œuvres dans le domaine des arts appliqués. Un dessin ou un modèle, s’il est original (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »), peut être protégé par le droit d’auteur.

Ont ainsi été considérés comme protégés par le droit d’auteur, des baffles, un stylo à bille à quatre couleurs, les uniformes de la police fédérale, des sacs, des chaussures, la chaise tripp trapp, des objets de design, etc.

Un dessin/modèle peut également bénéficier d’un autre régime de protection, via la législation spécifique relative aux dessins et modèles, à condition que l’objet créé soit nouveau et ait un caractère individuel. Pour profiter de cette protection, le designer devra effectuer un dépôt (soit Benelux, soit communautaire).


1.5.12. Personnages

Un personnage, tel qu’un personnage de bande dessinée, est protégé s’il est original (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »). Par exemple, si l’auteur lui a attribué des caractéristiques propres telles qu’un nom, un aspect spécifique, un univers, des caractéristiques psychologiques, etc.….

→ (Civil Bruxelles, 14 août 1997) les personnages sont protégés dans la mesure où l’auteur a défini leur caractère excentrique ainsi que leur aspect identifiable.

→ (Tribunal de Grande Instance de Nice (3e ch.), 24 janvier 2000) Cette affaire porte sur la protection du personnage « Charlot », incarné par Charlie Chaplin. Ce personnage, reconnu et protégé en tant que tel par le droit d’auteur, sera reproduit sans autorisation par un cabaret night-club. L’exploitante du cabaret sera tenue d’indemniser le préjudice des ayants-droit, car l’association du personnage de « Charlot » avec un lieu de strip-tease revient à donner un caractère sexuel au personnage, or ce personnage est connu par tous les publics, même les plus jeunes de la population.


1.5.13. Photographies

L’originalité d’une photographie (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») est généralement appréciée en fonction des choix personnels effectués par le photographe : le film (noir et blanc, couleur, sensibilité, contraste), l’appareil (automatique, digital, etc.), l’objectif (normal, grand angle, téléobjectif…), cadrage (serré, large…), ouverture du diaphragme (sujet net et fond net ou flou selon l’ouverture), éclairage (pas de flash, un flash, plusieurs flash, déclenchement différé, etc.), filtre (dégradé de couleur, flou, polarisant, etc.), développement (choix de la chimie, contraste, sensibilité, etc.), …

Les photos sont dans la plupart des cas considérées comme suffisamment originales et donc protégeables.

Par exemple :

→ (Cour d’appel de Paris, 20 février 2008) Dans une affaire datant de 2008, le juge français a admis l’originalité d’une œuvre photographique, prise sur un plateau de tournage, et justifie sa position : « Si le photographe de plateau qui n’a le choix, ni du lieu, ni du moment où la photo est prise, ni du cadre, ni de la position des personnages, ni des éclairages, réalisés par les auteurs de l’œuvre cinématographique, ne peut revendiquer la qualité d’auteur, il en va autrement lorsqu’il opère des choix techniques, esthétiques et artistiques indépendants du réalisateur, tels que ceux relatifs à l’éclairage, le cadrage, la composition de l’image, le choix de l’instant et de l’expressivité des personnages, exprimant, dans la représentation qui en est faite, le propre regard, la sensibilité et l’empreinte personnelle de l’auteur ».

En revanche, le juge admet parfois qu’une photo n’est pas suffisamment originale :

→ (Cour d’appel de Paris, 5 décembre 2007) À Paris, un litige opposait deux sociétés de presse, l’une ayant utilisé les photograhies de l’autre, sans autorisation. Le juge a dû décider si les photographies utilisées, représentant le Prince William et Kate sur un téléski, étaient protégées par le droit d’auteur, afin de déterminer s’il y aurait dû avoir une autorisation pour l’utilisation desdites photographies. Ainsi, selon le juge, les photos du demandeur ne sont pas originales car ne font que reproduire une scène d’une grande banalité, sans que la sensibilité des photographes ou leur compétence ne ressorte.

→ (Cassation française, 13 novembre 2008)Dans une affaire ayant opposé un artiste, auteur d’une oeuvre intitulée « Paradis” qu’il a créée pour une exposition organisée dans un hôpital psychiatrique, en apposant le mot “Paradis” au-dessus de la porte des toilettes de l’ancien dortoir des alcooliques de l’établissement à un photographe dont des photographies de cette oeuvre avaient été ultérieurement exposées lors d’une manifestation intitulée “Parlez-moi d’amour”, la Cour de Cassation française a en 2008 jugé que l’oeuvre litigieuse ne consiste pas en une simple reproduction du terme “Paradis”, mais en l’apposition de ce mot en lettres dorées avec effet de patine et dans un graphisme particulier, sur une porte vétuste, à la serrure en forme de croix, encastrée dans un mur décrépi dont la peinture s’écaille, que cette combinaison implique des choix esthétiques traduisant la personnalité de l’auteur ; que de ces constatations et appréciations souveraines faisant ressortir que l’approche conceptuelle de l’artiste, qui consiste à apposer un mot dans un lieu particulier en le détournant de son sens commun, s’était formellement exprimée dans une réalisation matérielle originale.


1.5.14. Programmes d’ordinateur

La législation belge précise explicitement que le programme d’ordinateur est protégé s’il est original, en ce sens qu'il est une création intellectuelle propre à son auteur. Aucun autre critère ne s'applique pour déterminer s'il peut bénéficier d'une protection par le droit d'auteur.

La loi protège notamment les codes sources, l’architecture du site, son ergonomie et les interfaces (aspects visuels). Les fonctionnalités d’un site ne sont pas protégées (voir question 1.2 : « Quand pouvons-nous considérer qu‘il s’agit d’une création littéraire et artistique protégée ? »).

1.5.15. Recueils d’œuvres, anthologies, encyclopédies

Les recueils d’œuvres, les anthologies et les encyclopédies peuvent être considérées comme étant des « bases de données » (voir point 1.5.20 : « Base de données »). Cette notion est définie en droit belge de la manière suivante : « un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d’une autre manière ».

1.5.16. Sites web

Un site web se compose de plusieurs éléments : textes, images, sons, logiciels, etc.

La mise en page, le graphisme, les codes, l’agencement et la structure des rubriques, des textes seront autant d’éléments qui pourront être considérés comme originaux (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») et donc donner lieu à une protection du site web par le droit d’auteur.


1.5.17. Slogans

Si le principe de la protection par droit d’auteur d’un slogan est admis, l’originalité (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») est souvent refusée dans la pratique et la protection n’est donc pas accordée car le slogan est la plupart du temps trop concis (ne se composant que de quelques mots souvent banals).

Ainsi, la protection a été refusée dans les cas suivants :

→ (Cour d’appel de Bruxelles, 3 février 1986) « Le salon du salon » pour le salon de l’automobile ;

→ (Commerce Paris, 28 mai 1990) « On est tous vache qui rit » pour des produits laitiers ;

→ (Tribunal de première instance de Bruxelles (chambre civile), 16 février 2001) « Zoveel mensen, zoveel schoonen» pour des chaussures.

La protection a, par contre, été accordée au slogan « un sourire, une carte …et c’est payé » pour des distributeurs automatiques (Cour d’appel Bruxelles, 3 juin 1998).

Un slogan formé d'un jeu de mot, par exemple « Du beau, du bon, Dubonnet » devrait pouvoir être considéré comme protégeable.

Enfin, les slogans inspirés de proverbes universellement connus ne peuvent faire l’objet d’une protection par droit d’auteur.


1.5.18. Titres

Le titre d’une œuvre ou d’un magazine peut, en théorie, être protégé.

En pratique, vu le fait que le titre est la plupart du temps composé de quelques mots souvent banals ou tirés du langage courant, la protection est souvent refusée car le titre n’est pas considéré comme étant original, (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »). Ils sont par contre parfois enregistrés sous forme de marque.

La protection par le droit d’auteur a ainsi été refusée dans les cas suivants :

→ (Civil Bruxelles, 18 décembre 2000) « Metro » pour un magazine ;

→ (Cour d’appel Paris, 19 mai 2000) « Fashion TV » pour une émission de télévision ;

→ (Cour de Cassation française, 17 octobre 2000) « Les maîtres du temps » pour un titre de film.

La protection a été accordée dans les cas suivants :

→ (Tribunal de Grande Instance de Nanterre, 28 avril 1998) Le titre « Vol de nuit » de l’œuvre de l'auteur Saint-Exupéry a été jugé original pour le motif qu’il s’agit d’une expression n'appartenant pas au langage courant et que sa concision et l'association de trois mots, sans adjectif ni article, évoque la solitude du pilote de nuit ;

→ (Tribunal commerce Seine, 26 juin 1951) « Les hauts de Hurlevent », traduction du titre du roman d'Emilie Brontë « Wuthering Heights », a été jugé original dans la mesure où il n’est pas une traduction littérale du titre anglais mais « une trouvaille » rendant de manière angoissante, musicale et inquiétante, l'atmosphère du titre originaire ;

→ (Cour d’appel Lyon, 5 juillet 1979) Le titre « Clochemerle » a été considéré comme original, le rapprochement des mots 'cloche' et 'merle' étant une création de l'esprit.

En conclusion, en droit belge, si un titre est banal, il ne sera pas protégé par le droit d’auteur et pourra donc être utilisé pour désigner une autre œuvre, sous réserve du respect de la loi relative aux pratiques de commerce (voir : « pdfLoi sur les pratiques de commerce »).


1.5.19. Traductions

Une œuvre traduite sera protégée si elle est originale (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? »), c’est-à-dire si l’auteur a procédé à des choix personnels quant aux mots ou expressions, ce qui est souvent le cas.

Des textes écrits, des exposés oraux ou encore des œuvres cinématographiques peuvent être traduits, doublés ou sous-titrés. Tant l’œuvre d’origine que la traduction sont protégées.
L’exploitation d’une traduction nécessite donc deux autorisations, celle de l’auteur de l’œuvre originale (ou de son éditeur, si l’auteur lui a cédé ses droits) et celle du traducteur.


1.5.20. Bases de données

Les bases de données profitent de deux protections différentes :

- D’abord via le droit d’auteur qui protège le contenant, la structure et la présentation de la base de données. Cette première protection via le droit d’auteur ne s’étend pas au contenu, aux œuvres elles-mêmes, aux données ou aux éléments eux-mêmes.

- Ensuite, les bases de données bénéficient également d’un autre régime de protection, prévu par le Code de droit économique. Une protection est conférée au contenu de la base de données si celle-ci constitue, par le choix et la disposition des matières, une création intellectuelle propre à son auteur.

Pour pouvoir invoquer cette protection, il est nécessaire que « l'obtention, la vérification ou la présentation du contenu atteste un investissement qualitativement ou quantitativement substantiel ». Cet investissement se traduit notamment par la mise en œuvre de ressources ou de moyens humains, financiers ou techniques.

Cette protection profite au producteur de la base de données. Le critère de protection n’est plus l’originalité mais bien l’investissement qualitatif nécessaire pour la compiler.

La durée de cette protection particulière des bases de données est de 15 ans à partir de son achèvement. En cas de modification substantielle, un nouveau délai de 15 ans pourra courir au bénéfice de la base de données modifiée.


1.6. Quelles sont les créations exclues de la protection par le droit d’auteur ?


Les idées abstraites, même si elles sont géniales, les thèmes et méthodes ne sont pas protégeables par le droit d’auteur. Ils font partie du domaine public et peuvent donc être exploités par tout un chacun.

Le droit d’auteur protège uniquement la forme dans laquelle l’idée est mise en forme (voir question 1.3 : « Quand une œuvre est-elle mise en forme ? »). Toute personne est ainsi libre de réaliser un film ou d’écrire un livre dont le sujet est un voyage autour du monde.

De même, un style déterminé n’est pas protégé : dans la réalisation d’un film ou d’une peinture, on peut s’inspirer du style d’autres auteurs. On peut par exemple réaliser un film dans le style de Tarantino, une peinture dans le style de Magritte ou une architecture dans le style Horta.

La distinction entre une « idée » (non protégée) et une œuvre suffisamment mise en forme (protégée par le droit d’auteur) est parfois très délicate ; il s’agit d’une question de fait appréciée au cas par cas par les juges.

À titre d’exemple :
→ (Tribunal de première instance de Bruxelles, 8 juillet 2002) Le concept “City Parade” ne donne pas lieu à une protection par le droit d’auteur, car les éléments qui composent la City Parade ne sont pas uniques, ni originaux. Un évènement où un cortège de chariots parcoure la ville dans le cadre d’un certain thème en suivant une route bien précise, est une donnée courante. Le fait que la City Parade est précédée d’une soirée et est clôturée avec une soirée, le fait qu’il y ait une grande promotion via des medias spécialisés et que ceci est accompagné d’un plan de sécurité, n’apporte aucune originalité au concept.

→ (Cour de Cassation, 19 mars 1998) Le concept publicitaire d’une grande chaussure dominant entièrement le plan, placée sur un fond de couleur uni et clair et accompagnée d’un texte, qui se réfère à des textes ludiques, n’est pas protégeable par le droit d’auteur.

→ (Civil Bruxelles, 8 juillet 2002) Un procédé visant à juxtaposer des petites photographies, prises sous des angles différents et à des distances différentes, dans une seule image ne donne aucune protection par le droit d’auteur.

→ (Tribunal de première instance de Bruxelles, 4 mai 2001) L’idée générale d’un scénario selon lequel un réfugié serait emmené sur une île pour purger une peine de mort et qu’ensuite il serait amené à disparaître, n’est pas protégée par le droit d’auteur. Lorsque le juge a comparé les 2 scénarios, il est apparu que l’idée générale seulement avait été reprise mais que par contre l’élaboration concrète des 2 scénarios était suffisamment différente.

→ (Tribunal de première instance de Bruxelles, 22 janvier 1988) L’idée de réaliser un film sur la lutte contre un requin qui sème la panique dans une station thermale n’est pas protégée. Par contre une décision française en a jugé autrement.

→ La Cour d’appel de Paris a estimé que l’idée d’emballer un monument de tissus n’est pas protégeable. Par contre, l’habillage du Pont Neuf de Paris en tant que tel était protégé, ce qui permettait à son auteur de s’opposer à la reproduction de photographies de son œuvre. Il ne peut pas pour autant s’opposer à ce que d’autres artistes habillent d’autres monuments, par exemple.


1.7. Œuvres explicitement exclues par la législation belge sur le droit d’auteur


Certaines catégories de créations sont expressément exclues de la protection par notre législation sur le droit d’auteur.

Les discours publics prononcés dans les assemblées délibérantes, dans les audiences publiques, dans des juridictions ou dans les réunions politiques, peuvent être librement reproduits et communiqués au public, mais à l'auteur seul appartient le droit de les tirer à part.

De même, les actes officiels de l’Etat belge ne sont pas protégés par le droit d’auteur. Par exemple les lois, les arrêtés royaux, les règlements communaux, les décisions des tribunaux, etc.

La protection des saveurs et des fragrances de parfum ne fait pas l’unanimité en Europe. Protégées aux Pays-Bas, les fragrances de parfum ne le sont pas en France.

→ Selon l’avocat général auprès de la Cour de Justice de l’UE, Melchior Wathelet, les saveurs sont exclues de la protection par le droit d’auteur, car elles ne sont pas des œuvres au sens de la législation en droit d’auteur. En effet, elles ne peuvent être identifiées de manière objective, l’identification d’un gout étant, par nature, un exercice subjectif. Le litige oppose la société Levola Hengelo BV à la société Smilde Foods BV. Levola introduit une action contre Smilde Foods, invoquant son droit d’auteur sur la saveur d’un fromage frais qu’elle a commercialisé, estimant que la saveur du fromage de Smilde Foods est identique à celle de son produit. En revanche, la forme dans laquelle est exprimée une recette culinaire peut être protégée par le droit d’auteur si l’expression de la recette est originale (CJUE, n° C-310/17, Conclusions de l'avocat général de la Cour, 25 juillet 2018).

→ La fragrance d’un parfum n’est pas protégeable par le droit d’auteur car « ne constitue pas la création d’une forme d’expression pouvant bénéficier de la protection des œuvres de l’esprit » La Cour de cassation française rapproche la fragrance d’une formule, cette dernière n’étant pas protégeable par le droit d’auteur (Cour de cassation française, 13 juin 2006).


1.8. Œuvres dans le domaine public


Les œuvres appartenant au domaine public ne sont pas protégées par le droit d’auteur.

En principe, cela vise deux hypothèses :
- une œuvre qui n’est pas originale (voir question 1.4 : « Quand une œuvre est-elle originale ? ») ;
- une œuvre dont la durée de protection du droit d’auteur est venue à échéance, à savoir 70 ans après la mort de l’auteur (voir question 5.1 : « Quelle est la durée de protection du droit d’auteur ? »).


1.9. Le dépôt des œuvres est-il une condition de protection par le droit d’auteur ?


Une œuvre est protégée par le droit d’auteur sans formalité d’enregistrement ou de dépôt.

Le dépôt permet à l’auteur
(1) d’obtenir une date certaine de création de son œuvre,
(2) de démontrer, en cas de litige avec un tiers, sa paternité sur son œuvre
(3) et de démontrer qu’elle a été créée antérieurement à celle du tiers.

Il est possible de déposer tout type d’œuvre : scenarii, manuscrits, règlements de jeux, dessins, slogans, logos, illustrations, etc.

Attention, le dépôt d’une œuvre ne vaut pas déclaration d’une œuvre au répertoire de la société de gestion collective. Seule la déclaration de l’oeuvre permet la perception et la répartition des droits d’auteur par la société des gestion collective .

Vous pouvez déposer vos œuvres à la Maison des Auteurs selon les modalités précisées dans les conditions générales de dépôt.

Si vous souhaitez bénéficier d’un dépôt reconnu aux États-Unis, il est conseillé d’effectuer un dépôt auprès du Copyright Office.